"Vechernyaya Moskva (Moscou Soir)" écrit sur la vie d'artiste du peintre russe Kouzmine
et sur son exposition personnelle « Le lien des temps »
Le journal « Vechernyaya Moskva » (« Moscou Soir »), « Garçon, je passais la nuit à la gare, pour aller voir la Galerie Tretiakov », entrevue d'Evgueny Nekrasov avec l'artiste, tirée de la série « Ceux qui vivent sur un nuage ». Illustrations :
Nikolaï KOUZMINE
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Et cela, c'est vous ? C'est moi. Et là, c'est une pomme. C'est pour moi le meilleur symbole, la pomme. C’était encore cette chanson : « Pomme rouge, couleur de rose, tu m'aimes ou ne m'aimes pas ? » C'est une chanson d'enfant... Paris, quand tu as choisi la beauté, qu'as-tu donné en échange ? La pomme, symbole de reconnaissance pour la beauté. Pour l'ardeur, l'oiseau. Pour le temps, les horloges à balancier... Nous traversons maintenant la salle suivante, et là se dresse Big Ben l'anglaise. Pour moi c'est le lien avec les horloges « Pavel Boure » - j'ai été bercé par leur son. Ou alors, encore en Angleterre il y a des coqs dans chaque cathédrale, et pour nous les coqs, c'est dans Pouchkine, « Le Coq d'or »... C'est étonnant comme tout est lié. Aussi mon exposition s'appelle « Le lien des temps ». Mais comment avez-vous atterri en Angleterre ? C'est un destin d'artiste – un destin fortuit. Je peignai à l'église du Sud-Ouest dédiée à l'Archange Michel. Une belle église – les églises sont toutes belles. Je peins. C'est l'hiver. Un homme s'approche, habillé modestement, se tient debout, sans déranger. Mais c'est une longue histoire, de peindre un tableau. C'était pour une demi-journée, et il faisait froid, il était gelé. J'ai le sentiment qu'il veut me poser une question mais, comme je l’ai compris après, il ne comprend pas le russe, lui-même vient du Danemark. Mais il est né en Angleterre. Pour faire court, il a vu mes toiles et m'a invité au Danemark et en Angleterre. Il s'appelle Harry, il est à l'accoutumée professeur d'université, sans beaucoup d'argent selon les mesures occidentales, mais un homme intéressant. Et le Danemark... De nouveau le lien prend tout son sens. Autrefois j'aimais lire Andersen, et Harry m'a emmené là où se trouve le mémorial d'Andersen, là où se trouve l'univers des contes. Qu'attendez-vous de cette exposition ? Je n'en attends rien en particulier, je comprends que la vie, c'est quelque chose de compliqué. Je veux simplement montrer mes tableaux pour le jubilé de Moscou, qui m'a fait grandir et m'a élevé. Mais depuis quand vivez-vous à Moscou ? Depuis 1965, quand je suis entré à la « Stroganovka ». Mais il se trouve que Nijni-Novgorod est assez proche de Moscou. Je suis allé à la Galerie Tretiakov quand j'étais adolescent. Tu passes la nuit dans la gare, tu te laves dans les toilettes et pars visiter la Galerie Tretiakov... Tous les peintres, évidemment, aiment la Galerie Tretiakov. Moi je l'aime depuis l'enfance. Assurément, votre âme est à la fête ? La fête ce sont mes proches qui l'ont faite, ma femme et ma fille. On donne par égoïsme, quand on l'organise soi-même. C'est la première fois que je vois autant de mes tableaux. Dans l'atelier tu vois une ou deux toiles, et il est nécessaire à l'artiste de se retourner de temps en temps, pour regarder ce qu'il fera après... Je tente d'arriver à comprendre cela : qu'est-ce-que la vie ? Est-il possible d'incarner la vie dans un tableau sans un travail personnel, artistique, de transmission, pour parler franchement. ...Il sourit avec des yeux d'enfant. Comme s'il n'y avait rien de plus habituel que ces questions sur le secret de l'univers. Qu'est-ce-que la vie ? Si en général la réponse peut exister, quelqu'un pourra toujours venir le trouver, lui, l'habitant du nuage. Evgueny NEKRASOV.
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